vendredi 12 janvier 2018

Le quatrième mur - Sorj Chalandon

Titre : Le quatrième mur
Auteur : Sorj Chalandon
Edition : Le livre de poche
Nombre de pages : 328

L'idée de Samuel était belle et folle : monter l'Antigone de Jean Anouilh à Beyrouth. Voler deux heures à la guerre, en prélevant dans chaque camp un fils ou une fille pour en faire des acteurs. Puis rassembler ces ennemis sur une scène de fortune, entre cour détruite et jardin saccagé.
Samuel était grec. Juif, aussi. Mon frère en quelque sorte. Un jour, il m'a demandé de participer à cette trêve poétique. Il me l'a fait promettre, à moi, le petit théâtreux de patronage. Et je lui ai dit oui. Je suis allé à Beyrouth le 10 février 1982, main tendue à la paix. Avant que la guerre ne m'offre brutalement la sienne …

George, le personnage principal, est quelqu'un qu'on voit beaucoup évoluer au fil du livre, c'est un révolutionnaire, il est sensible, il me semble intelligent mais j'ai l'impression que quelque chose cloche chez lui mais je n'arrive pas à mettre le doigt dessus, je crois que c'est parce qu'il n'a jamais était décrit physiquement et que j'ai du mal à mettre des traits sur son visage. Je me suis représenté Samuel (un de ses amis qui est comme son frère) comme Grand Corps Malade, c'est quelqu'un de sage, avec une forte envie de changer le monde, il est d'ailleurs assez rêveur. Imane, actrice jouant le rôle d'Antigone, était mon personnage féminin préféré, magnifiquement belle, institutrice, révolutionnaire, comédienne, altruiste, sûre d'elle, je pense qu'elle est la femme que j'aimerais être et c'est sans doute pour ça que je me sentais à la fois proche et en même temps inférieur à elle. Nakad, acteur jouant le rôle d'Hémon, est mon personnage masculin préféré, j'ai aimé sa douceur, j'ai imaginé sa souffrance d'une part par la guerre et d'autre part d'être homosexuel dans une famille et dans un pays homophobe. Il m'a vraiment beaucoup touché.

Ce doit être l'un des premiers livres plus "adultes" que je lis et je n'en suis pas du tout déçu. Il se lit facilement et vite, les personnages sont vraiment très attachants même si je me suis parfois embrouillée puisqu'ils sont nombreux. Je me suis toujours à peu près imaginer les décors, malheureusement mon manque de culture sur ce pays a surement un peu restreint ma vision. Je vous conseille tous de même de voir le film "Valse avec Bachir" d'Ari Folman avant, ça m'a quand même permis de mieux concevoir les lieux et de comprendre mieux le contexte historique. Durant toute l'histoire, on se balade de communauté en communauté et j'ai adoré découvrir ces différentes cultures. Je n'ai pas l'habitude de lire des ouvrages sur la guerre et je me rends compte maintenant de mon erreur. C'est un livre poignant au quelle je repenserais encore longtemps, j'ai vraiment pris conscience de ce qu'était la guerre et que si un jour j'allais dans un pays en pleine bataille je ne serais plus jamais la même. Je pense maintenant beaucoup à tous ces pays et je vais dorénavant plus me renseigner sur les guerres dans le monde. Ce roman est aussi évidemment empli de beaucoup de violence (âme sensible s'abstenir) et cela m'a fait du bien d'être secouée, d'être sortie de mon univers, retour sur terre. J'aime le découpage des chapitres et je ne m'attendais pas du tout à la fin ce qui fut très agréable ! Malheureusement, je trouve quand même que les premiers chapitres s'étendent peut-être un peu trop sur la longueur. Les références à Victor Hugo m'ont énormément touché et je n'ai fait qu'adorer plus ce livre, de plus les clins d'œil à Manouchian m'ont retourné le cœur. J'ai aimé les tournures poétiques des phrases de Chalandon avec à la fois leurs longueurs courtes qui faisait tellement plus d'impact dans ma tête. J'ai compris tout ce que disait George, j'ai ressenti chacun de ses mots. J'aurai eu les mêmes réactions, j'avais tellement l'impression d'être lui c'est fou. Cet ouvrage m'a pris aux tripes et je comprends pourquoi il a reçu le prix des lecteurs. Je ne sais quoi dire sur ce roman à part qu'il nous change profondément et que cela ne m'était pas arrivée depuis longtemps, il m'a vraiment retourné. Je pense que je vais relativiser à présent sur mes petits problèmes du quotidien qui finalement ne sont rien.

"Et puis il a tiré. Deux coups. Un troisième, juste après. Cette fois sans trembler, sans que je sente rien venir. Son corps était raide de guerre. Mes larmes n'y ont rien fait. Ni la beauté d'Aurore, ni la fragilité de Louise, ni mon effroi. Il a tiré sur la ville, sur le souffle du vent. Il a tiré sur les lueurs d'espoir, sur la tristesse des hommes. Il a tiré sur moi, sur nous tous. Il a tiré sur l'or du soir qui tombe, le bouquet de houx vert et les bruyères en fleur."

2 commentaires:

  1. Je ne crois pas que ce livre pourrait tellement m'intéresser, mais j'ai vraiment aimé lire ton article :)

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